Si l’on en croit les ouvrages qu’EDF destine au grand public, “le nucléaire poursuivra son développement à travers le monde. Il est en effet le moyen de production le plus économique et le plus compétitif par rapport aux équipements fonctionnant au charbon ou au fuel”(sic). Et pourtant cela n’est pas la conclusion d’un rapport confidentiel destiné au conseil d’administration d’EDF, révélé en Avril 1993 par “The Guardian” (Londres). Selon ce document, les coûts de lh’énergie nucléaire augmentent de 12% par an. Cette hausse est due aux arrêts saisonniers pour contrôle des centrales nucléaires. En effet, entre 1986 et 1992, le coeffic ient d’utilisation des centrales est passé de 80% à 71.5%; et il continue de descendre… Le rapport ajoute que la découverte de fissures sur 10 couvercles de cuves a couté plus de 600 millions de francs et a provoqué des arrêts de réacteurs supplémentaires. Or ce rapport est optimiste, car il oublie de prendre en compte les frais de traitement des déchets radioactifs et de démantèlement des centrales. Les premiers à s’inquiéter du coût du démantèlement furent les Américains en 1982. Un article paru à l’époque dans “Que Choisir” calcule : “A titre expérimental, le département américain de l’énergie va dépenser 45 millions de dollars en 3 ans pour supprimer un seul ‘mini réacteur’ à eau pressurisée et rendre le terrain réutilisable, opération qui va durer 3 ans. […] Il faut donc concevoir des robots capables d’effectuer les opérations de ‘découpage’ du réacteur et l’enrobage des morceaux avec du ciment. D’ores et déjà, on envisage de laisser les réacteurs en place 80 à 100 ans après l’arrêt pour attendre que le taux de radioactivité disparaisse naturellement. […] la radioactivité est encore 4 fois supérieure à la dose permettant un accès sans précaution 180 ans après l’arrêt. On pense alors à ne pas détruire du tout.” En 1996, le National Audit Office (équivalent britannique de la cour des comptes) évalue le coût de démantèlement des 16 centrales britanniques (35 réacteurs) à 40 Milliards de livres (300 milliards de francs). Cela fait 9 milliards de francs par réacteur, ou 19 milliards de francs par centrale. Si ce coût est pris en compte, comme c’est le cas pour les calculs américains, britanniques et allemands, les prix français montent à 35 centimes le kilowattheure (au lieu de 25). Pour comparaison, le kilowattheure oscille entre 14 et 25 centimes dans les centrales thermiques au charbon, au gaz, au pétrole ou hydroélectriques de Grande Bretagne. Ce prix exorbitant de l’énergie nucléaire a d’ailleurs dissuadé la City fin 1995. Celle-ci a contraint le gouvernement anglais à l’abandon de ses projets de construction de nouvelles centrales, faute d’investissements. En Janvier 1996, tout comme “The Sunday Times”, “The Economist” admet publiquement avoir fait une lourde erreur en ayant cru au nucléaire bon marché : “La construction et la fermeture des centrales, ainsi que le traitement des combustibles irradiés, entraînent des coûts énormes et impossibles à évaluer précisément. Les gouvernements occidentaux, qui autrefois vantaient les louanges du nucléaire, reconnaissent aujourd’hui que le gaz et l’hydroèlectricité sont des sources d’énergie meilleur marché.” Dans le reste du Monde, alors qu’EDF déclare
que “le nucléaire est en bonne place” et “poursuit son développement, surtout
en Europe”, la réalité est bien différente : Contre vents et marées, la France annonce
la construction d’une trentaine de réacteurs dans les décennies à venir.
“Le rythme d’engagement de nouvelles tranches nucléaires suivra l’évolution
constatée de la Consommation. […] Les réacteurs à neutrons rapides, comme
Superphénix, pourront trouver leur place au siècle prochain”(sic EDF). Pour
Michel Schneider, directeur du service mondial d’information sur l’énergie,
“le nucléaire français semble être en très mauvaise posture et aucune solution
n’est en vue . De toute évidence, le prix de l’énergie est bien parti pour
monter en flèche et on voit mal comment on pourrait continuer à exporter
à un prix raisonnable”.
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